Comme on est en Inde, il aura fallu 12 heures dont 10 à attendre dans la zone portuaire de Chennai, pour embarquer le Toq'car sur un plateau (flat-rack), qui a été ensuite posé, grâce à une grue, sur un bateau. Mais notre maison sur roues aura été gâtée puisqu'il a fallu faire construire une rampe pour que le Jedi puisse la hisser sur le dit-plateau (les enfants et moi-même avions battu en retraite au bout de 6 heures), et que comme il s'agissait essentiellement d'entrepos de marbre aux alentours, les ouvriers présents (pieds-nus, en pagne, autant vous dire que les mesures de sécurité ne sont pas tout à fait les mêmes que chez nous) ont fabriqué en moins de deux une rampe en marbre, bois et cordages, parce qu'en Inde tout est réellement possible.
Comme on est en Inde, il nous aura fallu trois jours, dont pas mal de coups de fils et quelques moments de tension, pour récupérer ensuite nos papiers, qui sont finalement arrivés en même temps que le taxi qui devait nous conduire de nouveau à Mamallapuram afin d'y passer nos derniers jours en Inde (en fait, comme on est en Inde, on a quand même dû retarder un peu notre départ pour avoir ces papiers).
Comme on est en Inde, nous avons décidé, pour nos derniers jours, de nous offrir la turista dont nous n'osions plus rêver, du coup tout le monde rêve de nouveau de la cuisine de la Toquée.
Demain matin, nous prenons un taxi pour l'aéroport, nous montons dans un avion (Gaspard rêve maintenant que ce soit un hélicoptère) et nous nous envolons pour Kuala Lumpur, Malaisie.
Mais dans notre arche, qui a déjà quitté l'Inde par la mer et que nous devrions récupérer également d'ici quelques jours à Port Klang, nous emportons désormais l'habitude de vivre pieds-nus et de se déchausser en entrant dans les magasins, et de vivre sur le sol, l'histoire de Krishna en dessin-animé et en Hindi, les règles du Cricket et quelques heures devant Star-Cricket à l'hôtel, une fée clochette qui tinte quand elle marche comme toutes les petites indiennes, un héros qui parle anglais comme une vache indienne et risque marchander sa chocolatine chez Pommiers en rentrant et un babar qui aura fait rire toute l'Inde, la connaissance de corps de métiers oubliés mais que nous avons pu admirer longuement puisque les boutiques sont dans la rue, le bruit des cortèges de mariés, des feux de recul musicaux, des muezzins, déesses, messes, du croassement des corbeaux et des cris étranges d'oiseaux étranges, des lessiveuses qui tapent le linge si fort que certains de nos vêtements ne s'en remettront jamais, l'odeur de l'encens, des tourbillons anti-moustiques, du poisson qui sèche sur la plage, des tas d'ordure omniprésents et qui n'étonnent que nous, nous emportons le goût de la nourriture qu'on mange avec les mains et qui, même peu épicée, nous met le feu au gosier (et à l'estomac), mais régale nos papilles, le goût des papayes, des ananas, de la noix de coco, de fruits et légumes délicieux, celui du thé que l'on boit à longueur de journée plein de sucre et de lait, nous emportons des milliers de couleurs : celles des saris, des tissus, des peintures, des temples, des bracelets, le goût de l'ornement, des bintis, des bijoux, le souvenir des animaux décorés, aux cornes et au pelage peints, portant des colliers et guirlandes, les dessins à la craie sur le sol, les lumières multicolores le soir, le souvenir d'animaux incroyables et innombrables (y compris la licorne que nous n'avons pas oubliée, nous, dans notre arche), des studios de cinéma qu'on visite librement, des affiches de campagne politiques délirantes, des rickshaws, des petites boutiques de tout et de rien, des bonbons à une roupie, des marchands de glace ou ceux de sucre ambulants, des écoliers en uniforme impeccable, aux fleurs dans les cheveux pour les filles, mais pieds nus, des mendiants effrayants (et de l'humour noir involontaire d'Ulysse hier : "mais pourquoi elle demande de l'argent pour manger cette dame, elle n'a même pas de dents !"...), des cireurs de chaussure, des barbiers de rue, des enfants qui travaillent, de ces familles qui vivent sur les trottoirs, des petits acrobates de rue et de la débrouillardise générale, des petits autels parfaitement entretenus, des dieux bizarroides, du sourire et de l'impassibilité, du hochement de tête mystérieux, de la moustache, des jambes maigres ou du gros bide, des femmes toutes petites et menues, souvenir d'un pays contrasté et fou, du désert du Rajasthan à la nature foisonnante du Kerala et du Tamil Nadu en passant par les plages de rêve de Goa, des hauts sommets aux plaines arides, des villages de pêcheurs aux quartiers les plus riches des grandes villes, pays immense dont nous aurons vu si peu, aux villes tentaculaires (Bombay+Dehli+Calcutta = la population de la France), aux langues multiples, fêtes multiples, traditions multiples, cuisines multiples mais un pays surpeuplé qui a su générer sa religion, sa culture, son cinéma, ses voitures, son art, un pays d'une richesse folle et pourtant d'une pauvreté qui nous aura bouleversés et nous force à nous interroger sur son avenir, sur celui du monde en général tout simplement, et à revoir pas mal de nos certitudes tout en gardant espoir face à tant de beauté dans la misère.
Nous gardons le souvenir de fou-rires mémorables, de rencontres passionnantes, d'énervements innombrables, de découvertes, de stupéfaction, d'émotion et d'émerveillements.
Arrivés en Inde pour Diwali, nous repartons lors de la fête de Pongal, et toujours avec le même credo : nous reviendrons forcément.
Demain la Malaisie. Première fois que nous faisons un saut par dessus un océan et quelques pays, puisque la traversée de Birmanie nous est interdite, le choc risque donc être au rendez-vous. Pourvu que notre arche y soit aussi...
16 commentaires:
Merci pour les news !!!
Waouyw, une phrase de 615 mots, et dire qu'on me reproche parfois mon manque de synthèse...
Bisous bisous les malais !
au-revoir l'Inde!!!
On attend les nouvelles avec impatience!
deux saint paulois qui aiment L'Inde plus que tout ce qu'ils ont vu dans le monde vous remerçie d'avoir si justement ècrit tout ce que nous aurions pu d'ècrire à chacun de nos sèjours ,merçi encore .....Ilpleut des cordes sur saint paul et biarritz ...profitez du soleil!
Avez vous lu "L'Equilibre du monde" de Rohinton Mistry, un bonheur de 800 p. sur les beautés et les malheurs de l'Inde. Si non, dis moi où je peux vous l'envoyer. Profitez bien de votre nouvelle aventure.
On pense à vous et merci de nous faire revivre nos souvenirs pas si vieux et pourtant déjà trop loin....
Bises à vous 5
Vero et Arno
Quel beau portrait de ce pays que je ne connais pas (encore ?) !
Bon voyage et vivement les nouvelles aventures malaisiennes !!
Une question pour la prof de français qui me vient suite au commentaire précédent de Na.
Dit-on "la société malaise" ou "malaisienne" ? Malaisien est il le nom des habitants et malais l'adjectif ?
Je ne sais pas, et le net n'a pas su dissiper ce malaise.
Pour Ximun :près de la moitié des habitants sont Malais (les autres sont malaisiens, nuance ! c'est à dire de nationalité malaisienne, mais non d'origine malaise) - source : le guide du Routard.com
Ils sont bien arrivés et il y a 7 h de décalage horaire ! bisous
Avez vous fait bon voyage ?
Merci pour le texto... La princesse va de mieux en mieux... elle s'exerce les cordes vocales depuis son retour à la maison ! un régal... Elle sait déjà dire "arheu"...
dites nous quand vous récupérez le toc'car.
Bizzz
Merci Monique ! À la pointe de l'information. Bises.
Bonjour Ulysse,j'ai une super nouvelle:je suis prise à la flûte traversière!!!J'espère que vous allez bien!
Bisous à toute la famille et bon voyage!
Bon, alors finis les slaps? les jupes de gitanes? les bracelets aux chevilles?les tenues de babacool?
en Malaisie, c'est le pays des élégances de marque, non? habits griffés, talons hauts, chapeaux...j'attends les photos!
ALors alors alors ?
Il se passe quoi à la Loumpoure ?
(Hum...)
Heureux de savoir que le vol s'est bien passé et que vous en bien arrivés dans votre nouvelle terre d'aventure. Vivement les récits et les photos.
Bises à tous.
Et le toqcar est-il arrivé à bon port ? surtout pour les menus de Mme Le Toquin contre la turista ....
Bisous et oui, vivement les photos ...
sait-on, dans la philosophie indienne, qui a l'insigne honneur de se réincarner en bactérie de tourista ?
C'est vrai ca, ca aurait été rigolo que la famille au complet se prennent en photo habillé dans la tenue (ou le style) du pays à chaque nouveau pays.
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