Suivez nos nouvelles aventures sur http://lestoquesperdentlenord.blogspot.com

mardi 29 janvier 2008

Malaisie ou la belle vie



Elle est toujours belle la vie au pays des Toqués, mais après l'Inde, la Malaisie est la destination qu'il nous fallait. D'abord les malaisiens ont la bonne idée de n'être que 6 millions (un village en Inde) dont un tiers quasiment vit à Kuala Lumpur. Ensuite le pays est plutôt petit et vu la qualité excellente des routes et le peu de circulation, on le traverse à toute vitesse. Le roi a un nom genial :
Sa Majesté Al-Wathiqu Billah Tuanku Mizan Zainal Abidin Ibni Al-Marhum Sultan Mahmud Al-Muktafi Billah Shah, le Yang di-Pertuan Agong XIII. On espere que sa femme l'appelle Ali. Enfin c'est un pays passionnant qui cumule une modernité parfois effrayante de propreté, de règles, d'hygiénisation à outrance, qui nous donne une impression de parc d'attraction à l'américaine in vivo, un pays à la limite de l'Equateur donc à la végétation folle, et un pays dans lequel vivent côte à côte chinois, malais et quelques orang-asli, indiens de la jungle. Musulmans, hindous, bouddhistes, une poignée de chrétiens profitent tous des fêtes religieuses les uns des autres. (D'ailleurs il y a deux jours à KL nous campions devant chez l'évêque, là nous sommes sous la mosquée) Tandis que les malaises sont voilées et vêtues de tenues fleuris et colorés mais très pudiques, les chinoises sont à la pointe de la mode (les filles je vous dis pas les boutiques !!!), En revanche, drôle de voir que les chinois, depuis des siècles, sont restés très chinois, que ces différentes civilisations vivent ensemble mais sans se mélanger, ni se métisser, ni toujours s'aimer d'ailleurs, et ça c'est moins drôle.

En Malaisie on peut manger dans toutes les chaînes de Fast-food du monde, mais on peut aussi s'arrêter en bord de route, dans ces restaus installés dans la cuisine des familles, ouvertes, où on peut se régaler de ce qu'a préparé la maîtresse de maison tout en regardant la télé avec les enfants et les voisins, en lisant le journal ou en bavardant avec le chef de famille. Un peu chez Mémé en plus épicé en somme.

Après la ville-gratte-ciel de KL, les montagnes fraîches et les plantations de thé, nous voici dans le parc naturel du Taman Negara, la jungle la vraie, totalement préservée, une forêt de 130 millions d'années (ça donne le vertige), plus vieille encore que les forêts d'Amazonie. Le régal. Température autour de 33 D°, humidité à 90%, sangsues, fourmis géantes, rapides, déplacements en pirogue, arbres infinis, floating-restaurants (ça nous changera du roaling-restaurant) indiens, ponts suspendus, papillons, animaux, tout pour plaire aux toqués de tous âges.

Mais le mieux ici, ce qu'aucune photo ne pourra vous faire partager, c'est le bruit. La cacophonie même des oiseaux, singes et insectes. Un bruit qui nous réveille la nuit et qui fait que parfois on doit crier dans la jungle pour s'entendre (remarquez, nous on y parvient assez facilement), un bruit qui couvrirait presque les appels à la prière de la mosquée voisine, repris systématiquement par Gasp le Muezzin.

jeudi 24 janvier 2008

Grand bonheur de petite Toquée

Ce matin, alors que nous parcourions la jungle, notre poche en plastique a la main (dans notre guesthouse, un guide met a notre disposition des plans de randonnees, gratuitement, pourvu que nous nous engagions à ramasser les détritus que nous croisons), ma brebis des montagnes, heureuse comme à chaque fois que nous partons en rando, me saoulant de mille paroles, chansons, cris de joie (aucune chance de croiser un animal sauvage pour nous, juste une souris et deux serpents ce matin) m'a fait cette declaration : « Cette rando, c'est mieux que la fête foraine, mieux que tous les parcs, j'aimerais que Zoe soit là. Mais quel bonheur ce tour du monde ! Quelle bonne idée vous avez eu de le faire ! Gaspard aussi c'etait une bonne idee ! »

Je note, j'inscris ces mots dans ma mémoire et sur la toile pour les moments ou, dans une décennie environ, elle nous trouvera nullos craignos et ringardos presque aussi debilos que son petit frère.
Carpe diem

(il y a des photos !)

mercredi 23 janvier 2008

Petits bonheurs de grands voyageurs

Durant notre odyssée on redécouvre des joies simples.

La nourriture est appréciée par tous, les petits extras comme les frites ou les crêpes me valent des cris de joie encourageants, les trouvailles (vieux Bounty rassis au fond d'une échoppe indienne ou du beurre ou du yaourt mangeable, un pot de Nutella ou un chili pas trop piquant) sont acclamées, quant aux repas au restau, aux dégustations de nouveaux fruits ou légumes, aux repas cuisinés par nos hôtes, si Ulysse, pas du tout aventurier sur le plan culinaire, les redoute, Rachel en revanche s'en délecte un peu plus chaque jour. Et nous aussi. Même si je ne peux plus manger un curry. Et si nous savons que dans quelques mois nous serons fatigués par la cuisine asiatique qui, pour le moment, nous réjouit.

Ces derniers jours ont été emplis de joies simples pour les Toqués de Malaisie.

Nous avons eu l'idée d'aller demander nos visas vietnamiens à l'ambassade de Kuala Lumpur. Arrivés à 11h55 nous en étions sortis à midi (oui forcément ça fermait, on a battu tous nos records mais depuis les check-points pakistanais, on est des as au jeu du formulaire), il ne reste plus qu'à revenir les chercher dans une semaine. La bonne surprise c'était qu'ils ne gardent pas les passeports durant cette semaine. Ni une ni deux, face à la facilité de l'exercice, nous avons donc décidé d'aller frapper à la porte de l'ambassade du Cambodge. Certes il a fallu en trouver la nouvelle adresse que personne ne semblait connaître, mais une fois que nous y étions, en dix minutes les formalités étaient remplies, il ne nous restait qu'à passer dans l'après-midi. Tous ceux qui ont connu le casse-tête des visas, sauront apprécier autant que nous le bonheur que représentent de telles journées.

Et ce n'était qu'une partie de la journée puisque nous avons trouvé le temps d'aller regarder avec envie les enfants se baigner dans cette formidable pataugeoire au pied des Tours Petronas, Tours que nous avons eu le droit d'aller voir d'un peu plus haut, sur le flying-bridge, grâce au culot qui nous a poussés à aller demander en milieu de matinée s'il ne restait pas quelques tickets (ils sont gratuits mais la queue commence avant 8 heures le matin). Petit bonheur aussi que de réussir à cumuler dans une journée obligations administratives ou autres trucs pas drôles et occupations sympas pour les enfants ou autres Toqués.

Et ce n'était qu'une partie de la journée puisque nous avons quitté notre parking de Kuala (les chantiers de gratte-ciels c'est pratique pour ça !) pour prendre l'autoroute en direction des Cameron Highlands. Nous avions décidé de passer la nuit sur une aire. Vous savez les simples aires avec toilettes, généralement glauquissimes archi-craspeques chez nous. Là... petit bonheur pour voyageurs que de trouver des toilettes plus propres que chez mamie, et même... une douche de rêve, surtout par la chaleur tropicale que nous découvrons.

Et aujourd'hui, à Tana Ratha, si la guesthouse que nous convoitions n'a pas voulu de nous (nous avons un peu d'intendance/entretien/école/rangements à faire et avons besoin d'un peu de confort pour ça), nous en avons trouvé une très sympa et calme qui nous prête sa cour, sa connexion internet, ses tables et chaises-longues, et petit bonheur de nouveau : à deux pas une laverie nous tendait les bras. Self-Service comme ils annoncent. C'est à dire que vous déposez votre linge puant (chaleur tropicale...), que vous payez trois fois rien, et que le lendemain on vous ramène tout à domicile, lavé, séché, plié. Grand petit bonheur parce que chaleur tropicale = humidité, et pas besoin d'être un génie énergétique de mécanique des fluides (bisous les collègues) pour vous expliquer que faire sécher du linge dans le Toqcar à ce prix-là tiendrait non plus du petit bonheur mais du miracle.

Et notre plus grand petit bonheur, à la limite du miracle : ce soir, nous avons dû sortir nos pulls (et réexpliquer à Gaspard ce que c'était), et extirper les duvets du fond du Toq'car dans l'espoir fou d'une nuit un peu fraîche.

Cette aventure extraordinaire nous ramène aux bonheurs ordinaires, Toqué, isn't it ?

dimanche 20 janvier 2008

Les ailes des Toqués


Nous qui aimons les surprises, en ce moment nous sommes servis.
Il y a les prévisions, et puis la réalité, et entre les deux, en général quelques océans.

D'abord l'aéroport de Chennai est beaucoup plus petit que nous l'imaginions. Du coup nous y avons passé, le 17 janvier, des heures plutôt tranquilles, de longues heures puisque nous sommes arrivés très tôt le matin.
Ensuite les enfants étaient plus qu'heureux de cette nouvelle expérience, parce que nos pauvres petits Toqués n'avaient quasiment jamais pris d'avion ou du moins n'en gardaient aucun souvenir. Et puis nous avons oublié qu'ils ont l'habitude des longs trajets. Je redoute un peu qu'ensuite, dans le Toqcar, ils me demandent de servir des rafraîchissements sitôt le décollage effectué, qu'ils attendent leur plateau-repas, chaud et exotique, leur couverture, les écouteurs pour la vidéo, la musique au choix. Le trajet a été tellement rapide, que nous avons dû réveiller Rachel à l'aterrissage : dans nos embrouillaminis spatio-temporels nous avions oublié que l'horaire d'arrivée prenait en compte le décalage horaire, et que donc notre vol durait 2h30 de moins que prévu (les maths deviennent vraiment trop compliqués pour moi).
Notre Gaspatate a été parfait. Il a dormi lui aussi quoi.
Nous avions bien prévu d'être un peu dépaysés, mais l'arrivée à l'aéroport de Kuala Lumpur a été un vrai choc. Un aéroport de science-fiction, d'une propreté effrayante, d'un confort parfaitement étudié. Plus d'indiens, de femmes en sari, mais des chinois, des malaisiennes habillées à l'asiatique mais avec un voile, plus de saris mais des tissus fleuris, les batiks. Impossible de se perdre puisque tout est indiqué, même pas drôle !
Heureusement nous avons mis un peu d'animation dans les rangées bien policées de la douane. Au moment où nous nous apprêtions à demander nos visas pour la Malaisie et à convaincre les agents que nous étions des gens respectables, juste au moment où nous nous installions devant le douanier, Gaspatate a décidé de faire caca dans son pantalon. Et comme il ne porte pas de caleçon, pour plus de rapidité, et que la nourriture indienne aide au transit, la matière fécale, en grande quantité, a glissé le long de ses jambes dodues et est venue s'étaler généreusement sur le sol impeccable, et ses chaussures et les miennes quand j'ai foncé pour tenter de limiter les dégâts. Son, odeur et plaisir des yeux, rien ne manquait. Comme les malaisiens sont des gens sympas, une fois tout le monde passé au jet, ils nous ont tout de même acceptés dans leur pays.
Dans le taxi qui nous menait à l'hôtel stupéfaction : nous roulions sur des autoroutes immenses, plus grandes qu'en France, mais vides. Quant à l'arrivée à KL, pour nous habitants de la vieille Europe, le choc : des buildings éclairés, des ponts suspendus brillants dans la nuit. Notre hôtel est au milieu de Chinatown, le régal, surtout en ce moment, parce que les fêtards que nous sommes sont servis pendant cette odyssée : après la fête du sucre, Diwali, Pongal, nous fêterons dans quelques semaines le nouvel an chinois !
Le soir, pour que nous ne nous endormions pas sur nos lotus, Ulysse a décidé de faire une méga allergie, avec asthme, crise d'urticaire gigantissime et tout comme il faut. Grâce à la permanence téléphonique internationale du pédiatre des stars, et à une longue habitude des allergies impressionnantes, nous avons pu nous en tirer fièrement, mais nous nous en serions passés. Sans doute a-t-elle été provoquée par les remous de vapeurs de cacahuètes dus à l'AC dans l'avion.
Et puis au moment de consulter nos emails, nous avons tristement constaté que mon ordinateur n'avait pas survécu au voyage et comme il en était déjà à plusieurs resurrection ou réincarnations, nous pensons qu'il a atteint le stade final de son évolution.

Donc au final des bonnes et des mauvaises surprises. Le compte est bon, la balance à zéro, ouf.

Entre deux formalités pour le Toqcar que nous aurons lundi (nous vous passons le récit des détails administratifs, mais sur ce plan-là aussi on a eu de bonnes et mauvaises surprises), nous arpentons donc les rues chinoises et leurs centaines de stands de vidéo, électroniques, gadgets, bijoux, contrefaçons, nous mangeons chinois du matin au soir, nous découvrons des malls pharaoniques, certains contenant des parcs d'attraction ahurissants, nous vogons entre les buildings et la végétation équatoriale, découvrons des aires de jeux et des parcs de rêve, nous faisons nos premiers pas dans ce pays nouveau et prenons nos repères. Le plus étonnant et le plus agréable étant de se réhabituer à vivre au milieu d'une densité de population très raisonnable. Circuler dans des rues parfois vides, réaliser que les endroits les plus fréquentés de Kuala Lumpur ressemblent à l'avenue de la Reine Victoria un dimanche d'hiver, comparé à l'Inde, nous donne l'impression de mieux respirer, même si ici la chaleur est très très moite et la pluie fréquente.
Ulysse nous fait rire, il est totalement fou du physique asiatique, il adore les yeux bridés, les petits nez et ne cesse de s'extasier face à la beauté des malaisiens. Nous sommes heureux pour lui, il va être servi dans les mois qui viennent. Rachel qui avait adopté les bintis, les chaînes aux chevilles et les bracelets, risque ajouter quelques accessoires asiatiques à son style, on ne peut plus rien vous garantir pour le retour. Une constante toutefois dans ce changement radical : le personnel de l'hôtel et quelques commerçants de la rue nous saluent déjà d'un "Hello Babar !" à chacun de nos passages, et notre roi du monde continue de recevoir cadeaux et friandises. On essaie tout de même de lui faire comprendre, mais c'est pas gagné, qu'ici il doit porter des chaussures et pour la peine on lui en a même offert de nouvelles très belles de la couleur qu'il voulait : vertes (cf photo).

Si la Malaisie nous surprend déjà, nous attendons toutefois tous avec impatience de retrouver notre maison à roulettes. L'hôtel ce n'est vraiment pas pour nous (sauf le buffet du petit déjeuner). Ulysse nous racontait, il y a deux jours, un de ses rêves qu'il n'arrivait pas à expliquer : (je vous en livre la version courte, j'aurais dû aborder avec lui le résumé avant les adjectifs, les coordonnées, les juxtapositions et surtout ne pas lui transmettre ma tendance à la longueur et à la parenthèse ) Nous arrivions tous en prison. Nous visitions une très belle prison, avec de belles chambres, une salle à manger, une salle de jeux, mais heureusement il avait trouvé une solution pour pouvoir s'échapper entre les barbelés...
Il est vrai qu'on fatigue un peu de la prison dorée, on ressent tous cette impression d'être parqués dans une boîte, comme en dehors de la vie (surtout ici dans une chambre sans fenêtre...)
On veut retrouver notre Toqcar, nos fenêtres sur le monde, notre liberté et les routes de l'Odyssée.

mercredi 16 janvier 2008

L'Arche des Toqués


Comme on est en Inde, il aura fallu 12 heures dont 10 à attendre dans la zone portuaire de Chennai, pour embarquer le Toq'car sur un plateau (flat-rack), qui a été ensuite posé, grâce à une grue, sur un bateau. Mais notre maison sur roues aura été gâtée puisqu'il a fallu faire construire une rampe pour que le Jedi puisse la hisser sur le dit-plateau (les enfants et moi-même avions battu en retraite au bout de 6 heures), et que comme il s'agissait essentiellement d'entrepos de marbre aux alentours, les ouvriers présents (pieds-nus, en pagne, autant vous dire que les mesures de sécurité ne sont pas tout à fait les mêmes que chez nous) ont fabriqué en moins de deux une rampe en marbre, bois et cordages, parce qu'en Inde tout est réellement possible.

Comme on est en Inde, il nous aura fallu trois jours, dont pas mal de coups de fils et quelques moments de tension, pour récupérer ensuite nos papiers, qui sont finalement arrivés en même temps que le taxi qui devait nous conduire de nouveau à Mamallapuram afin d'y passer nos derniers jours en Inde (en fait, comme on est en Inde, on a quand même dû retarder un peu notre départ pour avoir ces papiers).

Comme on est en Inde, nous avons décidé, pour nos derniers jours, de nous offrir la turista dont nous n'osions plus rêver, du coup tout le monde rêve de nouveau de la cuisine de la Toquée.

Demain matin, nous prenons un taxi pour l'aéroport, nous montons dans un avion (Gaspard rêve maintenant que ce soit un hélicoptère) et nous nous envolons pour Kuala Lumpur, Malaisie.

Mais dans notre arche, qui a déjà quitté l'Inde par la mer et que nous devrions récupérer également d'ici quelques jours à Port Klang, nous emportons désormais l'habitude de vivre pieds-nus et de se déchausser en entrant dans les magasins, et de vivre sur le sol, l'histoire de Krishna en dessin-animé et en Hindi, les règles du Cricket et quelques heures devant Star-Cricket à l'hôtel, une fée clochette qui tinte quand elle marche comme toutes les petites indiennes, un héros qui parle anglais comme une vache indienne et risque marchander sa chocolatine chez Pommiers en rentrant et un babar qui aura fait rire toute l'Inde, la connaissance de corps de métiers oubliés mais que nous avons pu admirer longuement puisque les boutiques sont dans la rue, le bruit des cortèges de mariés, des feux de recul musicaux, des muezzins, déesses, messes, du croassement des corbeaux et des cris étranges d'oiseaux étranges, des lessiveuses qui tapent le linge si fort que certains de nos vêtements ne s'en remettront jamais, l'odeur de l'encens, des tourbillons anti-moustiques, du poisson qui sèche sur la plage, des tas d'ordure omniprésents et qui n'étonnent que nous, nous emportons le goût de la nourriture qu'on mange avec les mains et qui, même peu épicée, nous met le feu au gosier (et à l'estomac), mais régale nos papilles, le goût des papayes, des ananas, de la noix de coco, de fruits et légumes délicieux, celui du thé que l'on boit à longueur de journée plein de sucre et de lait, nous emportons des milliers de couleurs : celles des saris, des tissus, des peintures, des temples, des bracelets, le goût de l'ornement, des bintis, des bijoux, le souvenir des animaux décorés, aux cornes et au pelage peints, portant des colliers et guirlandes, les dessins à la craie sur le sol, les lumières multicolores le soir, le souvenir d'animaux incroyables et innombrables (y compris la licorne que nous n'avons pas oubliée, nous, dans notre arche), des studios de cinéma qu'on visite librement, des affiches de campagne politiques délirantes, des rickshaws, des petites boutiques de tout et de rien, des bonbons à une roupie, des marchands de glace ou ceux de sucre ambulants, des écoliers en uniforme impeccable, aux fleurs dans les cheveux pour les filles, mais pieds nus, des mendiants effrayants (et de l'humour noir involontaire d'Ulysse hier : "mais pourquoi elle demande de l'argent pour manger cette dame, elle n'a même pas de dents !"...), des cireurs de chaussure, des barbiers de rue, des enfants qui travaillent, de ces familles qui vivent sur les trottoirs, des petits acrobates de rue et de la débrouillardise générale, des petits autels parfaitement entretenus, des dieux bizarroides, du sourire et de l'impassibilité, du hochement de tête mystérieux, de la moustache, des jambes maigres ou du gros bide, des femmes toutes petites et menues, souvenir d'un pays contrasté et fou, du désert du Rajasthan à la nature foisonnante du Kerala et du Tamil Nadu en passant par les plages de rêve de Goa, des hauts sommets aux plaines arides, des villages de pêcheurs aux quartiers les plus riches des grandes villes, pays immense dont nous aurons vu si peu, aux villes tentaculaires (Bombay+Dehli+Calcutta = la population de la France), aux langues multiples, fêtes multiples, traditions multiples, cuisines multiples mais un pays surpeuplé qui a su générer sa religion, sa culture, son cinéma, ses voitures, son art, un pays d'une richesse folle et pourtant d'une pauvreté qui nous aura bouleversés et nous force à nous interroger sur son avenir, sur celui du monde en général tout simplement, et à revoir pas mal de nos certitudes tout en gardant espoir face à tant de beauté dans la misère.

Nous gardons le souvenir de fou-rires mémorables, de rencontres passionnantes, d'énervements innombrables, de découvertes, de stupéfaction, d'émotion et d'émerveillements.

Arrivés en Inde pour Diwali, nous repartons lors de la fête de Pongal, et toujours avec le même credo : nous reviendrons forcément.

Demain la Malaisie. Première fois que nous faisons un saut par dessus un océan et quelques pays, puisque la traversée de Birmanie nous est interdite, le choc risque donc être au rendez-vous. Pourvu que notre arche y soit aussi...

jeudi 10 janvier 2008

Petite philosophie à 10 roupies*


Après deux mois en Inde, forcément on s'interroge.


Mais qu'est-ce qui rend les indiens si calmes, d'une sérénité et d'une constance exaspérantes parfois mais admirables pour les hystériques d'occidentaux que nous sommes ? On a l'impression qu'ils ne s'énervent jamais et ils ont cette capacité à céder rapidement plutôt qu'avoir à discuter ou surtout à se battre. L'impression que les évènements de la vie passent sur eux sans les atteindre. Même Gandhi a voulu changer les choses, se demandant si ce n'était pas l'absence de viande dans leur alimentation qui les rendait si peu combattifs par rapport aux occidentaux. D'ailleurs, soyons clairs, la non-violence, les indiens la portent en eux, Gandhi l'a compris et n'aurait pu mener son combat chez nous.
Mais chez les indiens, cette sérénité, et aussi cette insouciance apparente tournent à la folie et font qu'ils sont capables, sur la route, de ne se soucier de rien, si ce n'est de la décoration de leur véhicule ou animal (souvent les deux ne forment qu'une seule et même entité). Et puis ils ont ce sourire, qu'ils vivent dans la rue, dans les pires conditions, au milieu des ordures et des rats dans des villes polluées bruyantes et épuisantes. Toujours le sourire. Si on faisait des sondages d'opinion sur le moral des indiens (s'ils savaient que ça existe, beaucoup riraient encore plus de nous, mais leur souci actuellement avec la France, c'est plutôt : que faire de Carla lors de la visite de Sarko ? On se régale des articles détaillant le protocole et les diverses possibilités) je suis certaine qu'on constaterait rapidement qu'ils ont un bien meilleur moral que les Français.
Qu'est-ce que les indiens ont et que nous n'avons pas et qui explique cette différence ?
La réponse je l'ai trouvée dans la religion d'abord, dans le cinéma ensuite.
La réponse, c'est la réincarnation, qui a mon sens est largement promue par Bollywood.
C'est simple, si les films indiens sont si longs (d'ailleurs il n'y a qu'un indien qui puisse tenir face à un film de 3-4 heures), c'est parce que le héros meurt et peut se réincarner plusieurs fois. ça permet des castings géniaux. Imaginez un film où (au hasard) Harison Ford se réincarne en Liam Neeson qui se réincarne en Georges Clooney etc. (vous n'êtes pas obligés d'imaginer les moustaches, les danses trop nombreuses et les scenarios kitchissimes).
Forcément, quand on croit qu'on a une vie meilleure après l'actuelle, et qu'il y en aura d'autres encore meilleures après, on ne craint plus grand chose.
Alors c'est sûr, chez nous, la réincarnation ça marcherait moyennement, personne n'a envie de finir en vache, même si elle a les cornes peintes mais je crois que, pour le moral des français, notre cinéma devrait réhabiliter la résurrection.
Certes la littérature et le cinéma ont parfois essayé de surfer sur cette vague. Mais en général ce sont des histoires archi cucu(es?) de fantômes, de personnes entre la vie et la mort qui reviennent, sous des formes floues et vaporeuses, à peine capables de soulever correctement des objets ou d'effrayer qui que ce soit et souvent incapables surtout d'apparaître aux yeux de tous. Il y a bien eu Ghost, qui nous a un peu émus, mais bon, au final, il me semble que l'héroine, c'est Whoopi Goldberg qu'elle se retrouve à embrasser au lieu de Patrick Swayze qui lui, n'a plus d'enveloppe charnelle. Et ça c'est quand même dommage. Et c'est sûr, c'est ça qui nous mine toutes. Et tous of course.
Mais se contenter de ces histoires mièvres de fantômes décharnés, c'est oublier que chez les chrétiens aussi, la resurrection est celle de la chair. C'est donc à l'église de promouvoir sérieusement la résurrection de la chair et le tour est joué. Patrick Swayze peut retrouver son corps de danseur, plus personne n'est obligé d'embrasser Whoopi Goldberg et c'est tout un peuple voire même plusieurs continents qui retrouvent le sourire et foi en l'avenir puisqu'il est désormais charnel et que les lendemains vont chanter. Vous allez me dire que la version indienne est plus séduisante : si on n'est pas mariée à Patrick Swayze, on voudrait peut-être avoir une chance, tant qu'à être veuve, que Marcel se réincarne dans une chair plus apétissante. Certes. Mais on ne peut tout avoir.

Puisqu'il y a parmi mes amis et lecteurs des prêtres et des cinéastes, je leur lance un appel solennel, je les en conjure : aidez notre patrie et tout l'occident, réhabilitez la résurrection de la chair ! (je ne m'adresse pas aux politiques parce qu'il me semble qu'il y en a au moins un qui avait compris le truc avant moi et qui l'expérimente en ce moment)
Et puis si ça marche pas, il sera toujours temps de tenter la réhabilitation de la moustache et du crachat bruyant.
Ou de solder ma petite philosophie.

*Toute ressemblance entre mon titre et quelque collection de livres dans laquelle certains de mes collègues s'illustreraient, sans avoir même eu l'idée de m'offrir "la petite philosophie du voyage" que j'ai aperçue en librairie juste avant mon départ, est bien évidemment totalement fortuite.

samedi 5 janvier 2008

Toqcar en sac


En vrac :


- J'ai appris au cours du sermon de dimanche dernier que Satan existe toujours, qu'il paraît même qu'il détourne certaines familles du rosaire le soir, pour les pousser vers la télévision, quant aux jeunes, je ne vous raconte même pas : il les incite à faire des trucs atroces comme du sexe ou de l'internet... Mais un remède existe : il suffit de prier Notre Dame de Fatima et de participer aux processions du samedi pour que tout s'arrange. Ouf. Après ça j'ai cru mourir écrasée parce qu'en Inde il en va de la communion comme de tout le reste et comme du rugby : on se serre tous et on pousse.


- Ulysse a perdu une dent, Rachel prie pour que ça lui arrive un jour, la petite souris est passée et pourtant c'est un des rares animaux qu'on n'a jamais vu en Inde, pour ma part je pense qu'il devait plutôt s'agir d'un gros rat.


- On a quitté Cochin et nos amis anglais sitôt 2008 entamée, depuis, notre Gasparov toujours aussi intello, les cherche toutes les cinq minutes.


- On a fait plutôt bonne route entre Cochin et Chennai, mais les indiens connaissent désormais beaucoup de gros-mots et d'insultes grâce à mon tendre époux.


- On a passé quelques jours dans le jardin d'une paroisse protestante, c'était formidiable sauf que le pasteur est maintenant à l'hôpital, nous espérons qu'il n'y a aucun rapport de cause à effet et on va prier Notre Dame de Fatima pour lui.


- On a eu une journée de pluie, on a donc marché dans les rues avec de l'eau et des ordures jusqu'aux genoux, on se demande vraiment comment font les indiens pour vivre cela 4 mois par an, sans doute encore une question de foi.


- Le Toqcar embarque mardi 10 pour sa croisière et pour le moment les formalités se passent sans encombre... on continue tout de même les prières.


- On décolle le 17 pour la Malaisie, Gasparov reste persuadé que notre avion voyage par bateau (priez quand même un peu pour lui svp)


- Après en avoir visité de nombreux, on a réservé deux hôtels : un à Chennai, puis un à Mallapuram (on raccourcit le nom) sur la côte plus au Sud, a priori sans trop de rats ni de cafards mais Gaspard ne perd pas espoir.


- Et comme on est rusés et qu'on devait avoir libéré notre parking pour la messe du dimanche, on est venus passer le week-end sur le parking de notre futur hôtel de Mallapuram, y'a une piscine, la mer, de beaux temples, un festival de danse et même des enfants français, et comme avant on a visité une ferme de crocodiles, on est tous heureux, y compris mon Indiana-Toqué qui a osé regarder quelques serpents dans les yeux, et presque fièrement (pieux mensonge n'est pas mortel).


- On fait nos sacs, on range le Toqcar, on continue quelques formalités, on cherche un hôtel à Kuala Lumpur, on essaie de comprendre comment on va récupérer notre Toqcar et quand, et surtout on prie pour le récupérer en bon état, on profite de nos dernières semaines en Inde tout en préparant avec plaisir nos prochaines aventures dans une nouvelle partie du monde.

PS : nouvelles photos en ligne !