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lundi 1 octobre 2007

Le dimanche à Ankara


Le dimanche à Ankara, c'est journée à la maison pour les Toqués. Journée un peu forcée à la maison puisque notre parking préféré est fermé le dimanche mais que nous avons eu l'autorisation d'y rester. Nous aurions pu nous en échapper, nous avons pu, cette semaine, observer à loisir les lycéens passant par dessus les grilles pour aller fumer en douce (et attention car les profs sont en alternance de permanence pour surveiller le parking et le jardin) mais l'idée d'une journée sans bouger nous plaisait assez. Donc après un appel particulièrement enjoué du Muezzin (je pense que le dimanche il dit quelque chose du genre : youpi c'est dimanche, youpi on travaille pas, prions avec enthousiasme, parce que nous qui ne l'entendions plus, il nous a surpris au petit matin) nous avons traîné bouquiné travaillé rangé bricolé nous nous sommes offert un apéro de roi, les enfant se sont inventé des mondes fantastiques où les parkings cotoient les mosquées, où les piscines ont des panneaux solaires, où les Winx à moitié nues gardent des zoos étrangement peuplés. Et entre deux nouvelles étagères et deux pages de Michel Tournier et de son histoire des rois-mages qui le passionnent, notre chauffeur préféré faisait tourner notre camping-car au gré du soleil. Car nous étions très bien placés ces derniers jours. Totalement à l'ombre, ne souffrant jamais de la chaleur (diurne parce que la nuit il fait froid) mais... mais nous nous sommes retrouvés quasiment sans électricité. Nous prenons l'habitude d'ailleurs aussi de gérer nos ressources en la matière, faisons vrombir nos lampes-dynamo et nous offrons des dîners et soirées aux chandelles. C'est d'ailleurs très reposant de vivre dans la pénombre, on parle doucement (sisi je vous jure même nous !) on se couche plus tôt.

Et moi j'en profite pour répondre à certaines de vos interrogations sur notre vie quotidienne.

Elle est particulière et très changeante.

Mais une constante demeure : les préoccupations ménagères et vitales : trouver de l'eau, avoir suffisamment d'électricité, de carburant, d'eau potable, de nourriture, laver le linge, parce que toutes ces choses qui sont si faciles et qui vont de soi habituellement, sont à réinventer quasiment chaque jour. La principale étant de trouver un endroit sûr, agréable pour dormir. Et si possible un endroit un peu discret parce que nous ne passons pas inaperçus, ni par notre véhicule, ni par nos apparences. Il est d'ailleurs fort étrange de se retrouver dans la peau de "l'étranger". On a beau faire tout ce qu'on peut pour ne pas trop détonner, visiblement nous surprenons. Et sommes surpris de surprendre. Même si la surprise est bienveillante.

Niveau nourriture ce sont des expériences souvent intéressantes, parfois franchement comiques. Nous avons des litres de yaourt dans le frigo, c'est en le servant en biberon aux enfants avec du Nesquik, que nous avons compris que ce n'était pas du lait. Enfin... que les grands nous ont dit que ce n'était pas du lait parce que Gaspard a tout bu sans rien dire. Au resto, nous ne savons pas souvent ce que nous commandons, c'est un peu la surprise à chaque fois, même si nous commençons à savoir gérer l'affaire.

Pour l'eau, on trouve régulièrement de bonnes volontés pour nous donner en donner mais c'est à chaque fois une opération différente, souvent comique là aussi. L'eau qu'on prend à des robinets de source n'a aucune pression, il faut un temps fou pour remplir notre réservoir et on se retrouve planté au milieu de la cambrousse avec trois vieux qui s'installent pour nous observer et commenter et nous nous sourions bêtement pendant d'interminables minutes. Il y a quelques jours, à Ankara, j'ai eu l'autorisation d'aller, à travers les grilles d'une fenêtre, brancher notre tuyau à un robinet de la cantine (ici personne ne mange sans aller se laver les mains avant ), Xtophe à l'autre bout gérait le réservoir. Je ne pouvais pas crier, ne voulant ameuter tous les employés et me voulant un peu discrète. Mais lorsque la pression est devenue trop forte que toute l'eau a jailli innondant toute la salle et me trempant de la tête aux pieds, je me suis doutée qu'il y avait un problème : effectivement, mon cher et tendre, mort de rire quand il m'a vue, avait oublié d'ouvrir la vanne de son côté...

Et puis il nous faut vider aussi nos eaux usées et notre boîte à caca. Mon homme est devenu expert pour trouver les égoûts, buissons cachés, et il ère discrètement la nuit, dans le vaste monde, sa cassette malodorante à la main. Ce n'est que du naturel puisque nous avons fait installer un système spécial (pour les détails techniques s'adresser au responsable technique de notre expédition) pour ne pas polluer davantage la terre entière.

Et il y a l'école. Pour l'instant nous navigons à vue. Nous tâchons de faire travailler les enfants tous les jours. Généralement, leur petit déjeuner avalé, ils se mettent au boulot tandis que Xtophe bricole bidouille ou promène avec Gaspard, où qu'on le colle devant un dvd et que je m'active à ranger la maison tout en bossant avec eux. Il y a des jours où c'est carrément improductif (fou le temps que peut mettre une enfant de 6 ans un peu rêveuse à se mettre au boulot-et je me coiffe et je taille mon crayon et je me gratte le nez et je colorie le cahier et je regarde par la fenêtre... fou ce que l'habitude du marchandage se prend vite à 8 ans et dans tous les domaines : "tu m'avais dit de faire l'exercice 6 mais regarde, c'est quasiment le même que le 4 alors j'ai fait le 18, ça revient au même hein ?". En revanche quel bonheur de voir Ulysse reconnaître les cultures en plateaux, de pouvoir lui montrer la préhistoire qu'il a étudiée dans le musée d'Ankara, de revoir la naissance de l'Islam avec lui dans son manuel ! Rachel lit très très bien, donc nous l'y encourageons, et j'insiste sur l'écriture. Ulysse aime toujours autant ça, nous avons pu recharger un peu nos réserves de bouquins, mais nous vous mettrons bientôt à contribution je crois (dès que nous aurons eu notre première expérience de poste restante) Je tâche d'être plus présente pour le français et surtout l'orthographe, mais il fait ses maths entièrement seul. Nous l'aidons juste en ce moment à apprendre ses tables de multiplications. Nous avançons tranquillement à raison d'une heure par jour je pense. Difficile à évaluer. Et puis je n'ai pas de références de leur âge. Je ne m'inquiète pas, je crois qu'ils apprennent beaucoup. On a quelques moments d'énervement, j'ai environ zéro patience, ça ne me passionne pas j'avoue, surtout quand il s'agit de maths, alors régulièrement on prend tous de bonnes résolutions et on repart. Mais ils gagnent beaucoup en autonomie et moi j'apprends un peu plus sur l'apprentissage et on rigole beaucoup il faut le dire...

D'ailleurs les enfants tant qu'on en parle, sont totalement épanouis. Pas une seconde de cafard. Il faut avouer aussi que les mails et mots des amis leurs sont précieux. la liberté, la découverte, la nouveauté, le tout en famille, c'est le rêve pour eux. Ils mangent comme dix, dorment comme des loirs (comment aurait fait notre Rachouille en cp elle qui s'offre de méga siestes), marchent comme des champions, parce que qu'est-ce qu'on marche ! Ils retrouvent quelques joies simples dans leurs jeux et consolident leurs liens. Babar les fait mourir de rire, les exploite, les embête, les caline, c'est sans nul doute le grand gagnant de cette aventure. Parfois, comme le soir où on l'a prise dans le 4x4 des baroudeurs lyonnais sur le retour, pour la ramener au camping-car à la fin de notre apéro olympique, Rachel demande : "on est où déjà ?". Il faut dire que c'est une question que je me pose parfois aussi au réveil.

Et puis autre routine : le soir, l'équipe de direction des Toqués décide de la suite des évènements. Sous l'oreille attentive, indiscrète et très peu souvent muette, de ceux qui sont censés dormir derrière leur rideau. On étudie les guides, les plans, les cartes, les agendas, les documents. On pèse on évalue on imagine, on fait en fonction de certains impératifs de nos envies de nos besoins en repos, lessives, eau, école, temps calme ou changement. Dans l'ensemble on alterne des périodes où on roule pas mal et d'autres où, trouvant un endroit sympa, comme ici, on s'encroûte un peu.

Et puis on alterne aussi le tourisme classique : visite des grands lieux culturels historiques avec ce qu'on n'a pas le temps de faire en temps normal : vivre dans la ville, y faire des rencontres, nos courses, y traîner, et ça c'est totalement nouveau pour nous. D'ailleurs quand j'y pense c'est drôle : ce voyage montre bien notre caractère profondément citadin : c'est dans les grandes villes pour le moment que nous serons restés le plus longtemps que nous aurons été le plus à l'aise que nous aurons goûté le mieux à la vie locale.

Les Toqués aiment la ville, sa richesse, son activité, sa folie en somme.

En somme notre vie est certes assez trépidante mais une certaine routine s'est installée, bien agréable, et le fait de voyager avec notre maison était à coup sûr un bon choix, qui nous convient parfaitement même s'il nous impose certaines contraintes, notamment par sa taille (et nous ne sommes pas au bout de nos peines) mais c'est notre refuge, notre repère, nous y sommes très bien installés et chacun y trouve son compte.

Ainsi va la vie des Toqués après presque deux mois de voyage.

J'ai profité aussi de ce dimanche pour commencer un petit tableau à ma sauce (c'est à dire donc qu'il n'a rien d'un tableau) à l'intention des voyageurs qui tomberaient sur notre site en faisant des recherches. J'avoue que si j'aime me régaler du récit des autres, ce sont leurs infos pratiques surtout qui nous intéressent. Donc vous trouverez ci-joint (si j'y parviens sinon je le mettrai en ligne une autre fois) un lien, à partir de la Turquie de nos bons et mauvais plans.

19 commentaires:

Anonyme a dit…

La vie des Toqués semble réellement un conte de fée. Profitez-en bien. Je retrouve beaucoup de sensations et de sentiments en te lisant, comme celle d'être la minorité. Je me souviens le jour ou j'ai fait des démarches administratives; j'étais la seule blanche et je râlais un peu (pas trop fort) parce que personne ne respectait son tour. Un vieux monsieur s'est levé et m'a dit " Ah, nous les musulmans, on veut toujours être les premiers, on ne sait pas attendre son tour!". Je me suis sentie blanche, chrétienne et pas du tout du coin. Un petit coup de blues...

Une famille de Toqués a dit…

Bon... j'aı encore pondu une tartıne: Faut que j'arrete je saıs que c'est ıllısıble. Bon je vaıs faıre des efforts de concısıon dorenavant promıs !

Anonyme a dit…

Mais non je me régale et je m'y crois presque, continue à nous faire partager ta vie de tous les jours et de tous les instants, cela me fait visiter du pays sans bouger de mon antre et surtout cela me tranquillise sur votre parcour. Donc continue donc c'est merveilleux de vous savoir si loin et si près quand même. J'ai essayé de vous "skyper" car c'était allumé mais je n'ai pu avoir le contact. Tu diras à Ulysse que Maud fait toujours son solfège 2 fois par semaine et va faire de la natation au BO le mercredi soir et le samedi midi. La semaine est pleine + le programme scolaire qui change du CE1 vive nous. Bisous je suis plus bavarde que toi.

ximun a dit…

Les tartines, c'est bon.

Bisous les toqués, merchi pour cette petite fenêtre sur le monde qui se met à jour régulièrement.

Anonyme a dit…

Mais non TT, au contraire, continue. Et Bonne fête TT !! Bisous des tropiques.

Anonyme a dit…

Mais non, on les aime tes tartines!! tu ne nous as pas donné ton secret: comment étendre discrètement vos draps et toutes vos petites culottes sur un parking de lycée?

Anonyme a dit…

Non non non, ne fais aucun effort de concision je t'en supplie ! J'adore déjà te lire, tout ce que tu racontes est fantastique (bon, la boîte à caca mise à part peut-être...) et surtout j'aurai bientôt des nuits blanches à occuper, un bébé pendu au sein, donc non, ne cherche surtout pas à faire plus court !

Anonyme a dit…

thérèse, j'adore tes tartines! un coucou de notre pays où les quatre saisons se suivent dans la même journée! et le cafè turc il est comment? sandra

Mon anniversaire était super!On a fait des parcours un "ballon prisonnier"et du "limbo" Maud

Bisous à toute la famille!!!

Na a dit…

Eh bien, merci d'avoir pondu cette "tartine" comme tu dis, parce que là, on vous imagine super bien au quotidien, c'est vraiment génial !! Quel plaisir de te lire, ma TT ! Continue ! J'avoue que j'avais eu mal au coeur en pensant que vous ne preniez que rarement des douches chaudes (alors que c'est le lot de la moitié de la planète...), petite chochotte que je suis !!!
Je pense que vous pourrez nous donner de sacrées leçons d'écologie en rentrant.

Anonyme a dit…

Au fait, qu'est-il arrivé à Gasp le casse-cou ?!!
Marie, je n'avais pas pensé à l'étendage des culottes mais tu soulèves un point crucial...

Anonyme a dit…

Trop fort, le dimanche sur le parking, j'adore !!! euh... vous pouviez en sortir en cas d'absolue nécessité ?!

Anonyme a dit…

j'adore tes tartines ! Merci pour tous ces merveilleux récits je lis plus ou moins régulièrement - en focntion du nombre d'enfants présnets dans la maison en fait ;-))) et compte tenu de mon incapacité à blogguer en donnant le sein !

Anonyme a dit…

Simon n'a pas relevé, l'air de rien, que que l'ère où l'air de l'aire du Lycée fait que l'orthographe erre a sonné. Sinon, merci pour ces récits et ces moments où nous vous imaginons si bien. On en veut le double et tous les jours SVP Bisous

Une famille de Toqués a dit…

Pour les culottes on les etend dedans. Mais le seche-linge du lavomatic de la mosquee fonctionne tres bien ! On evite les guirlandes de sous vetements. Franchement une autre chose apprecıable apres avoir affronte les plages et campings croates c'est la decence de ce pays qui sans etre excessive est relle. Nos enfants sont les seuls a montrer leurs jambes et on leur met les pantalons le plus long possıble Rach est la seule pte fille a ne pas porter de collants et c'est vraıment qd mon jean etaıt puant que j'ai ose une robe mais avec epaules couvertes.
Gaspard a joue au foot avec son frere... on l'appelle croutor. Beurrrrrk.
Gros bisous Maud and co !

Anonyme a dit…

Génial ce long récit.
Juste un truc concernant "babar", je n'ai pas trop compris le passage..
Trop fort le coup de la vanne pour l'eau ! hi! hi! hi!
Si les enfants veulent des livres, je veux bien leur en envoyer... genre les éditions du père castor, les livres sont tout fins, donc tout légers par la poste et il y a beaucoup de choix...
Bonne continuation.

Anonyme a dit…

j'ai bien reçu ton mail, merci beaucoup... je t'ai répondu, j'espère que tu le recevras.
Muxus

ximun a dit…

Babar je pense que c'est Gasp....

Anonyme a dit…

La pudeur (votre remarque sur la Croatie) est une notion qui, autour de quelques principes quasi-intangibles (nudité intégrale rare), varie selon les cultures. Quand je vais en Ukraine (Odessa, par ex), dans ce domaine je suis surpris par deux choses : les tenues très légères des jeunes dames et jeune filles, voire fillettes, et l’absence de réactions dans leur entourage. Ce qui chez nous provoquerait critiques, voire insultes ou agressions, chez eux ne provoque rien. Je sens ça comme la solide bonne santé de Martine quand elle envoie paître Tartufe, lui disant que le voir tout nu du haut en bas ne lui ferait rien.

On retrouve cette bonne santé chez les enfants ukrainiens tels que les lycéens qui nous ont accueillis la première année de notre échange : tous ont une activité sportive ou culturelle, filles comme garçons et beaucoup dansent (classique, jazz, folklore), sans aucun mal à être en collants. Quand je pense que dans mon collège la chorale a du mal à recruter des garçons, seuls quelques-uns ayant le courage d’affronter les moqueries sur ce « truc de tapettes »…

Bonne continuation, et n’ayez aucun scrupule à être bavarde ;-) Il y a seulement que je dois modifier la taille de l'affichage. Ca c'est la faute de mon nouvel ordi !

Anonyme a dit…

Oui, c'est bien ce que j'ai pensé, mais comme son nom usuel est gaspatate ou gaspacho ou..... et pour la premiere fois : babar....
Pour ma compréhension personnelle, j'aurai préféré Gasbabar...
Ah la nouveauté ! on a du mal à s'y faire !